Une Foire qui foire
Solidarité rurale du Québec (SRQ) nous invitait, début
février à Montréal, à la 3è édition de sa Foire des villages. L’événement a pour but de faire un lien
entre les régions et le grand centre urbain qu’est Montréal, et d’inciter les
urbains à aller s’installer en campagne.
La stratégie est-elle bonne pour repeupler les villages
moribonds ? J’en doute
énormément…
Pourquoi ? Parce qu’on veut d’abord vendre des
produits aux visiteurs.
La moitié de l’espace est occupée
par des kiosques qui nous vendent de produits du terroir. C’est bien de vendre de tels produits
mais ça n’amène pas du monde à la quincaillerie du village et ça ne repeuple
pas les rangs. L’autre moitié du
plancher d’exposition regroupe des intervenants de certaines MRC du
Québec. Encore là, 50 % des
gens avec lesquels j’ai discuté m’ont d’abord offert des forfaits vacances,
m’ont présenté leur région par le biais d’activités récréotouristiques, de
lieux à visiter. Personne ne m’a
parlé stratégie de développement régional, de l’activité économique majeure de
la région, du milieu de vie de base (écoles, succursales bancaires et postales,
services de santé, etc.) offerts.
Un des facteurs majeurs pour lesquels les régions se sont vidées au
cours des 25 dernières années, c’est l’impossibilité pour les citoyenNEs de
s’installer non pas dans les villages mais sur le territoire. Le zonage agricole, strictement
industriel, couvre très souvent plus de 90 % du territoire d’une MRC. Où les humains peuvent-ils aller alors ? J’aurais aimé voir un kiosque (j’y suis
allé le vendredi soir et il n’y avait personne à celui de SRQ!) où des gens
m’auraient informé de la difficulté que l’on rencontre avec la Commission de
protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ) quand on veut s’installer
sur un rang. Est-ce parce que
l’événement est financé en majeure partie par l’UPA ?
Comment se fait-il que SRQ
n’initie pas une action politique pour conscientiser le gouvernement sur le
désastre démographique provoqué par la CPTAQ et l’agriculture industrielle
prônée par l’UPA?
Le développement économique
régional viendra après que les gens de tous âges et de toutes classes sociales
se seront installés en région. Le
seul fait de créer un groupement humain provoque de l’activité économique … et
attire d’autres humains. On ne
peut mettre une petite usine dans un village si l’entrepreneur ne peut trouver
de personnel qualifié pour y travailler !
Comment se fait-il que le dossier
de l’occupation du territoire soit l’affaire de groupements de citoyens comme
la Coalition citoyenne et l’Union paysanne plutôt que celle de SRQ ? Comment se fait-il que c’est une simple citoyenne des
Bois-Francs, Mme Marie-Christine Nys, qui ligue actuellement les maires de plus
de 400 municipalités rurales et des préfets de MRC pour amener les citoyenNEs à
avoir droit à leur pays ? SRQ
reste absolument muette à ce sujet.
On a même l’impression qu’elle se dissocie de cette lutte.
Quant à moi, la Foire des villages
passe littéralement à côté de son but.
Ce n’est pas en vendant des produits du terroir aux montréalais que l’on
amènera des gens en région.
C’est une foire qui foire!
Guy Boissé, 6 février 2005.